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là, encore en costume de cour, mêlées aux invités qui s’en vont ; plus rien d’officiel dans leur manière : on dirait des personnes déguisées pour jouer les phalènes et les bombyx dans une féerie ; l’impératrice disparue, elles rient, saluent, tendent la main aux uns et aux autres avec l’aisance américaine.

Nous reprenons nos voitures ; nous repassons la porte noire et l’épaisse muraille grise, et nous voici hors de la prison immense des empereurs.

Yeddo, alentour des longs murs d’Akasaba, vient d’allumer ses milliers de lanternes peintes et continue plus fort que jamais son bourdonnement des soirs de fête.

Une heure de course échevelée là dedans pour arriver à la gare. Des cris, des collisions, des cahots. Il y a de tout sur ma route, du vieux Japon encore extraordinaire, et du nouveau Japon ridicule ; il y a jusqu’à des tramways, des sonnettes électriques, des chapeaux à haute forme et des macfarlanes.

Mais je traverse ces choses sans beaucoup les voir, ayant encore dans les yeux l’impératrice et son cortège. Pour la première fois de ma vie, je sens une sorte de regret vague en songeant à cette disparition prochaine et complète d’une civilisation qui avait été si raffinée pendant des siècles. Et, à ces impressions, s’ajoute cette mélancolie, — oh ! très passagère, je le sais d’avance, mais