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goût fantasque et qui donnent aux femmes de gentilles tournures mièvres. Non, le costume de la souveraine et des nobles dames du palais n’est rien qui ressemble à cela, même de loin ; c’est quelque chose de plus simple et de plus singulier, qui les fait larges, plates, rigides, hiératiques, n’ayant plus forme de femmes. Pour définir leur silhouette qui me hante, je ne trouve que cette image : deux cornets renversés et juxtaposés, dont les pointes seraient aux épaules et dont les ouvertures très élargies toucheraient le sol. On ne sait comment appeler cet assemblage, qu’elles portent, de deux jupes séparées, une pour chaque jambe ; — deux jupes raides et bouffantes, deux cônes en soie rouge qui s’extravasent par le bas d’une incompréhensible manière. Leur camail de prêtresse, avec ses manches pagodes excessivement grandes et longues, commence depuis le haut ce pli unique, de chaque côté du corps, que continuent ensuite jusqu’à terre les deux jupes de pourpre.

Si ces jupes sont toujours rouges (par étiquette, comme les souliers), les camails, au contraire, varient de couleur à l’infini. Et quelles couleurs ! Des amarantes, des jaunes capucine, des bleus turquoise, des verts à reflets de cuivre, des grenats qui paraissent recéler du feu ; puis des teintes sans nom, d’une intensité extrême, ou bien d’une pâleur effacée, presque fuyante. Et tous ils sont