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lées, d’oriflammes extravagantes qui flottent au vent. Tantôt on court au milieu du bruit et des cris ; tantôt c’est dans le silence des choses abandonnées, parmi les débris d’un grand passé mort. On est au milieu des étalages miroitants, des étoffes et des porcelaines ; ou bien on approche des grands temples, et les marchands d’idoles ouvrent seuls leurs boutiques pleines d’inimaginables figures ; ou bien encore on a la surprise d’entrer brusquement sous un bois de bambous, aux tiges prodigieusement hautes, serrées, frêles, donnant l’impression d’être devenu un infime insecte qui circulerait sous les graminées fines de nos champs au mois de juin.

Et quel immense capharnaüm religieux, quel gigantesque sanctuaire d’adoration que ce Kioto des anciens empereurs ! Trois mille temples où dorment d’incalculables richesses, consacrées à toutes sortes de dieux, de déesses ou de bêtes. Des palais vides et silencieux, où l’on traverse pieds nus des séries de salles tout en laque d’or, décorées avec une étrangeté rare et exquise. Des bois sacrés aux arbres centenaires, dont les avenues sont bordées d’une légion de monstres, en granit, en marbre ou en bronze.