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ont-ils endossé, par-dessus le costume national, des ulsters et des macfarlanes (restes des vieux stocks invendables de l’Amérique du Nord) ; la majorité de la population grelotte, dans des costumes de pays chaud. Au coin des rues, les coureurs, demi-nus et tatoués, qui stationnent près de leur petit char, ont jeté sur leurs épaules la couverture écarlate destinée à envelopper les jambes des clients et soufflent dans leurs doigts, en enflant le dos comme des singes frileux. Un grouillement bien triste et bien laid que celui d’Yeddo, l’hiver, au milieu de l’immense, de l’infini dédale des maisonnettes basses et grisâtres, éternellement pareilles.

Donc, c’est dimanche aujourd’hui — et on s’en aperçoit parfaitement : ils commencent à singer nos allures et notre ennui de ce jour-là, ces païens. C’est surtout la mauvaise manière qui leur a servi de modèle, à ce qu’il semble, car beaucoup de boutiques sont fermées et beaucoup de gens sont ivres.

Des familles, qui partent pour la promenade, ont vraiment un air endimanché dans leurs toilettes d’extrême Asie. Et puis c’est jour de repos et de sortie dans les casernes, et il y a par les rues des bandes de matelots à peu près habillés comme les nôtres, des bandes de soldats à pantalon rouge et à gants de fil blanc, avec des airs en goguette ; petits, petits, tous, et jeunes : des enfants,