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dans l’épaisseur des murailles, prêtes à enlacer, à déchirer les chairs. Cette splendeur a des dessous mystérieusement hostiles ; on la sent pleine de surprises et de menaces. Au-dessus de nos têtes, les linteaux sont ornés cependant de grandes fleurs exquises en bronze ou en or : roses, pivoines, glycines, branches printanières de cerisier aux boutons entrouverts ; mais, plus haut encore, des visages effrayants, immobilisés dans des grimaces macabres, se penchent vers nous ; des épouvantes de toutes formes se tiennent accrochées par leurs ailes d’or aux solives d’or des toitures ; on aperçoit en l’air des alignements de bouches fendues par des rires atroces, des alignements d’yeux à demi perdus dans d’inquiétants sommeils…

Un vieux prêtre, averti par le bruit des galets dans le silence de la cour, paraît derrière nous sur le bronze du seuil. Pour examiner ma permission que je lui présente, il met sur son nez des lunettes rondes qui lui font un regard de chouette.

En règle, mes papiers. Une révérence, et il s’écarte pour me laisser entrer.

Dans ce palais il fait sombre, de cette mystérieuse demi-obscurité où se complaisent les Esprits. Les impressions qu’on éprouve en y entrant sont toutes de splendeur et de calme.

Des murailles d’or, et une voûte d’or soutenue