traversée, et nous nous y entassons avec nos bagages. Tous Japonais, mes compagnons de route, bien que quelques-uns, lancés dans le progrès occidental, portent jaquette et chapeau melon. Il est environ dix heures ; un petit vent froid nous saisit sur cette rivière. Derrière nous, dans le lointain, on aperçoit encore le grand cône étrange du mont Fusiyama avec sa cime blanche de neige ; et on l’a tellement vu et revu, au fond de tous les paysages peints sur papier de riz, qu’il suffirait à lui seul pour donner l’indication du Japon si on l’avait perdue.
Des bateliers, en longues robes bleues bariolées de grecques blanches, nous passent assez lestement, en poussant du fond avec des perches. Et, sur la rive opposée, nous attend un autre train où nous reprenons machinalement nos mêmes places. — Encore mes voisins de tout à l’heure ; nous échangeons, en nous retrouvant, des saluts discrets ; — le colonel m’offre une cigarette.
Et le train file, toujours en plaine avec des montagnes bleuâtres à l’horizon.
Vraiment ce pays ressemble à notre France d’automne : des bois au feuillage jauni, et des vignes vierges courant çà et là en guirlandes rouges ; par terre, des graminées sèches et des scabieuses. Seuls, les laboureurs qui travaillent aux champs diffèrent, avec leurs figures jaunes d’Asie et leurs manches pagodes en coton bleu.