Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/113

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’on réchauffe à mesure de peur qu’elles n’attrapent un refroidissement. — Mais, en vérité, elles ont l’air d’avoir été mises là pour bouillir : on dirait d’une soupe aux petites filles préparée pour quelque Gargantua cannibale…

Et si contentes, toutes deux, de gambader dans l’eau tiède ; — et si amusées de ce que nous passons précisément à ce moment-là, faisant mille singeries à notre intention, dansant, plongeant avec un jeu d’éclaboussures, ou bien se redressant debout, toutes nues, comme des diablotins qui sortent d’une marmite ! Et ces deux vieux Nippons — grand-père et grand’mère évidemment, chevelures blanches autour de visages en parchemin jaune — assis sur leur porte, veillant ce bouillon avec une tendre bonhomie, et souriant eux-mêmes de nous voir rire…

Cela fuit promptement derrière nous, cette maisonnette solitaire, cette cuisine, cette gaieté de braves gens que nous ne reverrons jamais, — et nous continuons de courir dans les rizières maintenant désertes, entre les petites montagnes toujours pareilles, emportant de notre méprise première un souvenir très drôle, qui sans doute nous amusera longtemps.