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réalité de ma présence à bord. Personne ne sait ici mon nom, encore moins ce que je vais faire là-bas et combien cette approche me trouble. Ce retour à Stamboul prend, à cette heure, je ne sais quel air clandestin, et funèbre aussi, dans le silence de plus en plus absolu du navire, qui s’endort tout en fuyant.

Instinctivement, mes yeux regardent et suivent deux ou trois petits feux très lointains, à peine perceptibles, qui semblent piqués au hasard sur l’immensité neutre, — dans le ciel ou dans la mer, on ne sait trop, — et qui sont des phares de la côte turque. La mer devient de plus en plus inerte, et notre allure, toujours plus glissante, dans la nuit confuse où l’horizon n’a pas de contours.