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alentour si personne n’est là qui puisse me voir, je m’étends doucement et j’embrasse cette terre, au-dessus de la place où doit être le visage mort.

Il y a des années que j’avais eu le pressentiment, et pour ainsi dire la vision anticipée de tout ce que je fais ce matin : sous un ciel bas et sombre comme celui-ci, je m’étais vu, revenant, dans ce costume d’autrefois, pour me coucher sur sa tombe et embrasser sa terre… Et c’est aujourd’hui, c’est maintenant, ce dernier baiser, — et voici qu’il ne me semble plus que ce soit bien réel ; je me laisse distraire ici-même par je ne sais quoi, peut-être par l’immensité du décor funèbre, par tout ce charme de désolation dont s’entoure et s’agrandit, à