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tombeaux. Et, seul cette fois, je chemine à cheval le long de la grande muraille de Stamboul, seul infiniment sous ce ciel bas et obscur, seul aussi loin que je puis voir au milieu de ces landes et de ces bois funéraires.

La muraille se prolonge à mesure que j’avance, se déroule, toujours pareille dans les lointains de la campagne morte. Elle a l’air de soutenir, avec les millions de pointes de ses créneaux, les lourdes nuées traînantes prêtes à tomber sur la terre. Elle est d’une sinistre couleur sombre, par cette matinée sans soleil. Débris colossal du passé, elle nous diminue et nous écrase, nous et nos existences courtes, et nos souffrances d’une heure, et tout le rien instable que nous sommes.