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les seuls ayant regardé Aziyadé avec tendresse, vont s’éteindre et se décomposer ; cette image d’Aziyadé, qui persistait encore au fond de sa tête finissante, bientôt n’existera plus… Quand nous mourons, ce n’est que le commencement d’une série d’autres anéantissements partiels, nous plongeant toujours plus avant dans l’absolue nuit noire. Ceux qui nous aimaient meurent aussi ; toutes les têtes humaines, dans lesquelles notre image était à demi conservée, se désagrègent et retournent à la poussière ; tout ce qui nous avait appartenu se disperse et s’émiette ; nos portraits, que personne ne connaît plus, s’effacent ; — et notre nom s’oublie ; — et notre génération achève de passer…