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la pleine conscience de tout ce qu’il y a d’infiniment mélancolique dans notre course. La pensée que je m’approche d’elle, des débris qui ont été son corps, me fait passer de grands frissons glacés, et je sens revenir cette impression physique, qui est particulière aux heures de deuil, cette impression d’avoir les tempes, la poitrine, serrées peu à peu, de plus en plus, dans des étaux de fer.

Je regarde autour de moi les tombes, les plus rapprochées et aussi les plus lointaines, cherchant et interrogeant des yeux les moins vieilles, celles qui sont restées un peu blanches et où brille un peu d’or, celles qui n’ont pas encore pris l’uniforme teinte gris-roux de l’ensemble de tout cet immense ossuaire… Depuis