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effrayantes ; malgré toutes les distances, nos yeux se pénètrent et se comprennent ; elle pleure et, en la regardant, je sens que des larmes me viennent aussi. Elle est la dernière des dernières, négresse esclave de naissance, à présent débris à peine humain qui finit de misère sur un fumier, et je me penche sur elle avec une pitié tendre, et je crois que, sans grand effort, je lui donnerais un pieux baiser.

Certainement, dit-elle, elle se lèvera, malgré son mal ; elle se laissera conduire, emporter ; elle fera tout ce que je voudrai, au risque d’en mourir ce soir, heureuse, au delà de ce qu’elle aurait su demander pour son ciel, heureuse du rôle qu’elle va jouer entre sa maîtresse