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quelques minutes, pour un entretien suprême : lui dire que je l’ai aimée bien plus tendrement encore qu’elle ne le croyait et que je ne le croyais moi-même ; lui dire que jamais ne s’éteindra le regret de l’avoir perdue ; lui demander pardon de vivre, et d’être encore jeune, et d’aimer encore ; lui dire tout cela, et puis la laisser se rendormir dans la terre, après l’adieu plein d’amour ! Mais non, il faudra en rester pour l’éternité sur un malentendu affreusement cruel ; bientôt viendra mon heure de mourir aussi, rendant plus irréparable ce malentendu-là, et plus définitif encore ce silence entre nous, parce que toutes ces choses, qui n’avaient pu lui être dites, mais qui vivaient au fond de moi-même, seront mortes avec moi.