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que j’y habitais. Est-ce possible, mon Dieu, que tout y soit demeuré si pareil, que le soleil l’éclaire si gaiement, que je m’y retrouve, moi, encore jeune, et que, depuis des années, je ne sache plus rien d’elle, même pas si elle est vivante ou si elle s’est endormie dans la terre…

C’est mon premier instant de repos et de rêverie, depuis que j’ai commencé ma longue course errante. Ce soleil d’octobre, qui d’abord me semblait joyeux, sur cette place solitaire, subitement me devient triste, triste plus que la brume ou la nuit. Il ne me charme ni ne me trompe plus ; je n’ai conscience à présent que de son impassibilité devant les continuels anéantissements, les continuelles fins. Je sens de la mort, de la mélancolie