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et le mien s’éloignent davantage. L’idée chrétienne était restée longtemps flottante dans mon imagination alors même que je ne croyais plus ; elle avait un charme vague et consolant. Aujourd’hui, ce prestige est absolument tombé ; je ne connais rien de si vain, de si mensonger, de si inadmissible.

J’ai eu de terribles moments dans ma vie, j’ai cruellement souffert, tu le sais.

J’avais désiré me marier, je te l’avais dit ; je t’avais confié le soin de chercher une jeune fille qui fût digne de notre toit de famille et de notre vieille mère. Je te prie de n’y plus songer : je rendrais malheureuse la femme que j’épouserais, je préfère continuer une vie de plaisirs…

Je t’écris dans ma triste case d’Eyoub ; à part un petit garçon nommé Yousouf, que même j’habitue à obéir par signes pour m’épargner l’ennui de parler, je passe chez moi de longues heures sans adresser la parole à âme qui vive.

Je t’ai dit que je ne croyais à l’affection de personne ; cela est vrai. J’ai quelques amis qui m’en témoignent beaucoup, mais je n’y crois pas. Samuel, qui vient de me quitter, est peut-être encore de tous celui qui tient le plus à moi. Je ne