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jaunies d’août ; l’odeur des myrtes ; le tapage des marchands de fruits, les rues encombrées de raisins et de pastèques… Les premiers moments de mon séjour à Constantinople ont gravé ces images dans mon souvenir.

Je passais des après-midi au bord de cette route du Taxim, assis au vent sous les arbres, étranger à tous. En rêvant de ce temps qui venait de finir, je suivais d’un regard distrait ce défilé cosmopolite ; je songeais beaucoup à elle, étonné de la trouver si bien assise tout au fond de ma pensée.

Je fis dans ce quartier la connaissance du prêtre arménien qui me donna les premières notions de la langue turque. Je n’aimais pas encore ce pays comme je l’ai aimé plus tard ; je l’observais en touriste ; et Stamboul, dont les chrétiens avaient peur, m’était à peu près inconnu.

Pendant trois mois, je demeurai à Péra, songeant aux moyens d’exécuter ce projet impossible, aller habiter avec elle sur l’autre rive de la Corne d’or, vivre de la vie musulmane qui était sa vie, la posséder des jours entiers, comprendre et pénétrer ses pensées, lire au fond de son cœur des