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grande synagogue, et ce lieu est le seul où l’on trouve, la nuit, du mouvement sur la Corne d’or.

Ils chantaient, en passant, une chanson plaintive dans leur langue de iaoudis. Le bay-kouch continuait de voltiger sur nos têtes, et Aziyadé pleurait, de froid et de frayeur.

Quelle joie ce fut, quand nous amarrâmes sans bruit, dans l’obscurité profonde, notre caïque à l’échelle d’Eyoub ! Sauter sur la vase, de planche en planche (nous connaissions ces planches par cœur, en aveugles), traverser la petite place déserte, faire tourner doucement les serrures et les verrous, et refermer le tout derrière nous trois ; passer la visite des appartements vagues du rez-de-chaussée, le dessous de l’escalier, la cuisine, l’intérieur du four ; laisser nos chaussures pleines de boue et nos vêtements mouillés ; monter pieds nus sur les nattes blanches, donner le bonsoir à Achmet, qui se retirait dans son appartement ; entrer dans notre chambre et la fermer encore à clef ; laisser tomber derrière nous la portière arabe blanche et rouge ; nous asseoir sur les tapis épais, devant le brasero de cuivre qui couvait depuis le matin, et répandait une