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idée neuve, quelque notion nette et profonde sur des choses qu’elle semblerait devoir ignorer absolument, et que je lui demande : « Qui t’a appris cela, ma chérie ? » — Aziyadé répond : « C’est ma mère Béhidjé. »

« Ma mère » et « mon père » sont des titres de respect qu’on emploie en Turquie lorsqu’on parle de personnes âgées, même lorsque ces personnes vous sont indifférentes ou inconnues.

Béhidjé-hanum n’est point une mère pour Aziyadé. Tout au moins est-ce une mère imprudente, qui ne craint pas d’exalter terriblement la jeune imagination de son enfant.

Elle l’exalte au point de vue religieux d’abord, tant et si bien, que la pauvre petite abandonnée verse souvent des larmes très amères sur son amour pour un infidèle.

Elle l’exalte au point de vue romanesque aussi, par le récit de longues histoires, contées avec esprit et avec feu, qui me sont redites la nuit, par les lèvres fraîches de ma bien-aimée.

Longues histoires fantastiques, aventures du grand Tchengiz ou des anciens héros du désert, légendes persanes ou tartares, où l’on voit de