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pénétration et de persistance, que je détournai la tête sous ce regard.

— Moi, dis-je, ma chérie ! Je ne me plains de rien quand tu es là, et je suis plus heureux qu’un roi.

— En effet, qui est plus aimé que toi, Loti ? et qui pourrais-tu bien envier ? Envierais-tu même le sultan ?

Cela est vrai, le sultan, l’homme qui, pour les Ottomans, doit jouir de la plus grande somme du bonheur sur la terre, n’est pas l’homme que je puis envier ; il est fatigué et vieilli et, de plus il est constitutionnel.

— Je pense, Aziyadé, dis-je, que le padishah donnerait tout ce qu’il possède, — même son émeraude qui est aussi large qu’une main, même sa charte et son parlement, — pour avoir ma liberté et ma jeunesse.

J’avais envie de dire : « Pour t’avoir, toi !… » mais le padishah ferait sans doute bien peu de cas d’une jeune femme, si charmante qu’elle fût, et j’eus peur surtout de prononcer une rengaine d’opéra-comique. Mon costume y prêtait d’ailleurs : une glace m’envoyait une image déplaisante