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taines heures, par des côtés communs d’enfantillage, mais qu’il dominait de haut par la pensée et par le rêve.

Toujours raisonnable d’intention, il se dit qu’il chercherait à permuter et à partir ; que, d’ici là, il vivrait sage et retiré, économisant sur toutes choses et dormant chaque nuit dans son hamac, malgré la tristesse du navire presque vide et de l’arsenal désert.

Grand garçon de vingt-deux ans, on le voyait passer dans les rues, le soir, l’allure lente et fière, très beau, les grands yeux doux, la barbe noire, le cou bronzé et puissant, découvert par le col bleu. Avec une indifférence voulue, il regardait les jeunes filles, n’en trouvant d’ailleurs aucune à son gré, et ne manquait jamais, à la nuit tombante, avant le coup de canon de retraite, de franchir la grille de l’arsenal qui se refermait derrière lui jusqu’au lendemain.