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au niveau et dans la région spéciale de son grand rêve, inexprimé, imprécis, auquel il eût été si incapable de donner une forme quelconque. Les romans de mœurs du jour, même les plus excellents, ne l’intéressaient guère, parce que sa simplicité ignorait les complications de la vie contemporaine ; elle planait au-dessus, quand elle ne s’amusait pas à des enfantillages à côté. Ainsi, il relisait volontiers trois fois de suite un chapitre de l’Apocalypse, ou la « Tentation de Saint-Antoine » de Flaubert, ou quelque sombre vision antédiluvienne de Rosny ; mais il lui fallait de telles choses — ou alors, pour s’en reposer, des drôleries stupéfiantes et suprêmes de Chat-Noir.

En somme, la rencontre de ce Morel aurait eu sur lui une influence inattendue, aurait augmenté et affiné sa faculté de concevoir et de souffrir, — car jamais il n’avait tant lu qu’avec lui, pendant ces veillées d’hiver.

De temps à autre, il lui arrivait tout de