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Le commentaire naturel du Mabinogi et des romans gallois se trouve surtout dans les Triades, sortes de mementos du passé mythologico-historique des Brittons. La forme triadique remonte sûrement à une haute antiquité ; elle est aussi familière aux Irlandais qu’aux Gallois. Chez ces derniers, elle est devenue un genre littéraire fort piquant, moral, satirique, juridique, philosophique[1]. C’est un lit de Procuste où des lettrés ont fait entrer de force trois par trois, les personnages et les choses du passé. Nul doute que cette méthode n’ait contribué à fausser les traditions brittoniques, mais elle a l’avantage d’aider la mémoire. Les Triades servaient sans doute, comme les Mabinogion, à l’enseignement bardique ; tous les poètes gallois du xiie au xvie siècle en sont littéralement nourris ; les noms qui y figurent ; leur sont aussi familiers qu’aux poètes grecs les noms des dieux et des héros de l’Olympe homérique. On possède plusieurs versions des Triades, mais elles paraissent remonter en somme à trois sources : de l’une dérivent les Triades du Livre Rouge, celles d’un manuscrit de Hengwrt, du xiiie-xive siècle, publiées dans le Cymmrodor, VII, part. II, p. 99, p. 126 par Egerton Phillimore (celles de la Myv. Arch., p. 393-399, jusqu’au n° 60 sont celles du ""Livre Rouge"" même) ; la seconde a donné les Triades imprimées par Skene,

  1. Cf. J. Loth, Triades humoristiques, morales et politiques des Gallois, texte et tradition, dans Annales de Bretagne, V, 506, 632.