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l’envoie chez son père Lac, à Carnant dont il ne connaît nullement la situation ; plus tard il l’enverra couronner à Nantes. Chrétien confond les deux Caer-Lleon, la ville du sud et celle du nord. Il met dans Yvain (vers 2.680) la cour d’Arthur à Cestre (Chester), tandis que dans le Livre Rouge (p. 283) elle est alors même à Kaer-Lleon-sur-Wysc dans le Sud-Galles. Or Cestre c’est également Kaer-Lleon (Castra Legionum). Ceci tendrait à prouver que l’original français antérieur dont se servait Chrétien a été composé en Angleterre. Chrétien ne connaît pas davantage la forêt où se passe la première chasse dans Erec : c’est dans Gereint, la forêt de Dena. Les mœurs sont françaises, avec des traits nettement celtiques de temps en temps ; on se sent en pleine civilisation française du xiie siècle, telle que nous la connaissons en France et en Angleterre. Les demeures sont des châteaux de seigneurs féodaux, avec quelques anachronismes trahissent un fond vieux celtique[1].

Le tournoi dans Owen et Lunet suffirait à dénoncer une source française. C’est un sport inconnu des Gallois ; le mot même (twrneimeint) est emprunté. Les tournois n’ont d’ailleurs guère été tolérés en Angleterre que sous Richard Ier.

L’armement est français. Il contraste avec celui

  1. Nitze, The castle of the Grail : an irish analogue (Repr. from. studies in Honour of A. Marshall Elliot, I, p. 39). Nitze démontre que la source des descriptions de Chrétien-Wolfram est celtique mais qu’il a dû y avoir un intermédiaire latin.