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les versions françaises. L’idée maîtresse du Peredur, qui paraît bien être une histoire de vengeance, apparaît plus clairement que dans le Perceval.

Chrétien a dû accentuer la note courtoise, le ton de modération, l’esprit de bonne tenue de ses héros et renchérir sur son original.

Dans les romans gallois, en effet, les mœurs qui contrastent si singulièrement avec la rudesse et même la barbarie atténuées cependant des personnages de Kulhwch, sont moins policées et moins courtoises dans la forme que chez l’auteur français.

En revanche, si on repousse l’idée d’une adaptation de Chrétien, il n’y a pas de doute que pour la plupart des épisodes, pour la trame et l’ensemble des trois récits, les romans gallois ne remontent à une source immédiate française[1].

La géographie de ces romans est vague, même pour le pays de Galles, le Cornwall, et la Bretagne insulaire celtique ; elle contraste avec la précision et le luxe de détails géographiques dans les romans purement gallois. Cependant elle est encore supérieure à celle de Chrétien. Quand Gereint quitte Caer-Lleon-sur-Wyse pour retourner en Cornwall, il arrive sur les bords de la Severn. Les nobles de Cornwall l’attendent sur l’autre rive[2]. Chrétien

  1. C’est au fond l’opinion de Gaston Paris, développée dans divers écrits : Histoire littéraire de la France, XXX, p. 1-270 ; Romania, X, p. 465 et suiv. : XII, p. 459, etc. Cf. Histoire de la littérature française du moyen âge.
  2. Ce serait un souvenir de l’époque même du Gereint historique, roi de Dumnonia, c’est-à-dire du Devon et du Cornwall.