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suite et atteignit la vallée d’une rivière qui arrive à Rome. Il chassa dans la vallée jusqu’au milieu du jour accompagné de trente-deux rois, tous portant couronne et ses vassaux. Ce n’était pas par plaisir qu’il chassait aussi longtemps ; il voulait se conduire comme un homme qui est le seigneur de tant de rois. Le soleil était haut dans le ciel au-dessus de leurs têtes, la chaleur était grande ; il fut pris de sommeil. Les valets de chambre dressèrent alors en cercle autour de lui leurs écus en les plaçant sur la hampe de leurs lances pour le défendre du soleil. Ils lui mirent sous la tête un bouclier émaillé d’or. Ainsi dormit Maxen.

Les traits du Maxime de l’histoire ne sont pas du tout ceux du personnage de la légende. Il est d’origine espagnole, repousse en Bretagne une attaque des Pictes et des Scots, est proclamé empereur par les légions, passe en Gaule, prend et tue Gratien à Lyon et est défait et tué par Valentinien et Théodose à Aquilée, 483-488 (v. Aurélius Victor, c. 47, 48 ; Zosime, III, 35 ; Paul Orose, VII, 34, 35 ; Sozomène, VII, 13 ; Prosper d’Aquitaine, aux années 383, 388 ; Prosper Tyron, à l’année 382). Paul Orose est le seul qui fasse son éloge. Gildas (X) le traite de tyran, et ajoute une remarque importante, c’est que la Bretagne, privée de soldats et de chefs par son expédition, devient par là, pour les Pictes et les Scots, une proie facile (XI). Nennius (XXII, XXIII) ajoute au récit de Gildas l’établissement des soldats bretons en Litaw (Armorique) ; ils tuent les hommes et conservent les femmes, après leur avoir coupé la langue, pour que leurs descendants n’aient pas d’autre langage que le leur ; d’où le nom de Letewicion, semi-tacentes, donné aux Armoricains, parce qu’ils parlent confusément. Nennius décompose le mot en Let-tewicion, « qui se taisent à demi, » étymologie des plus fantaisistes (v. J. Loth, De vocis aremoricae forma atque significatione, Picard, Paris, 1883). Gaufrei ajoute l’épisode de Conan Meriadec, reproduit depuis par tous les écrivains bretons armoricains (v. J. Loth, L’émigration bretonne en Armorique du V au VIIe siècle de notre ère, Paris, Picard, 1883, Introduction, V – VII), et beaucoup de détails romanesques. Ainsi Helen, fille du roi Coel, duc de Colchester, se marie à Constance père de Constantin. Après le départ de Constantin, Octavius, duc des Wissei (Essex), enlève le gouvernement aux princes à qui il l’avait confié. Sa fille, dont le nom n’est pas donné, est mariée à un sénateur romain, Maxen Wledic, qui était de race bretonne, étant fils de Llewelyn (Leoninus pour Leolinus), oncle d’Helen. Il est combattu par le neveu d’Octavius, Kynan Meiriadawc. La paix se fait entre eux. Kynan accompagne Maxen, et est récompensé par la royauté du Llydaw. Maxen tee Valentinien, détrône Gratien, mais est tué lui-même à Rome. Ses nombreuses troupes se dispersent, et une bonne partie se réfugient en Armorique avec Kynan Meiriadawc (Cf. Brut Tysilio, Myv. arch., p. 451 et suiv.). On voit que les traits principaux du songe, malgré de notables différences se retrouvent dans Gaufrei (sur la légende de Maxen, d’Ambroisius et d’Uter frères de Constans et fils de Constantin, sur l’origine et les éléments du faux, v, J. Loth, Revue celt., X, p. 418-489). Les Triades sont d’accord avec le songe : la troisième grande expédition a été emmenée de cette île par Elen Lluyddawg et Kynan son frère, seigneur de Meiriadawc jusqu’au Llydaw, où ils obtinrent des terres et des domaines de l’empereur Maxen Wledig, pour l’avoir aidé coutre les Romains. Ces guerriers étaient originaires de la terre de Meiriadawc, de Seisyllwg, de Gwyr et de Gorwennydd. Pas un ne revint ; ils restèrent en Llydaw et à Ystre Gyfaelwg, où ils dominèrent. À la suite de cette grande levée, il manqua d’hommes d’armes en Cymry, de façon que les Gwyddyl Pictes opprimèrent le pays. Gwrtheyrn Gwrtheuau fut obligé d’appeler les Saxons contre eux mais ceux-ci, voyant la faiblesse des Cymry, s’entendirent avec les Gwyddyl Pictes t les traîtres, et enlevèrent aux Cymry leur terre et leur suprématie (Myv. arch., p. 401, 11 ; cf. ibid., p. 395, 5). Le nom de Maxen n’est point populaire chez les poètes gallois ; son nom est une création de lettré, ainsi que les principaux traits de sa légende. Cependant Llewis Glyn Cothi compare Davydd ab Sion à Macsen, et sa femme Gwenllian à Elen, fille d’Eudav (p. 120, v. 50).

Pendant son sommeil, il eut une vision. Il lui