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retournant la tête ; elles tombèrent ainsi dans l’eau sans le savoir, et se noyèrent toutes à l’exception de Blodeuwedd. Gwydyon l’atteignit alors, et lui dit « Je ne te tuerai pas, je ferai pis [1]. Je te laisserai aller sous la forme d’un oiseau. Pour te punir de la honte que tu as faite à Lleu Llaw Gyffes, tu n’oseras jamais montrer ta face à la lumière du jour, par crainte de tous les autres oiseaux. Leur instinct les poussera à te frapper, à te traiter avec mépris partout où ils te trouveront. Tu ne perdras pas ton nom, on t’appellera toujours Blodeuwedd. » On appelle en effet le hibou Blodeuwedd, aujourd’hui encore [2]. C’est ainsi que le hibou est devenu un objet de haine pour tous les oiseaux.

Gronw Pebyr, lui, retourna à Penllynn, d’où il envoya une ambassade à Lleu Llaw Gyffes pour lui demander s’il voulait, pour prix de son outrage, terre, domaines, or ou argent. « Je n’accepte pas, »

  1. Sur le châtiment ou la réparation en cas d’adultère, cf. J. Loth, Le roman de Tristan et Iseut est-il d’origine celtique ? (Rev. Celt. XXX, p. 280).
  2. Cette tradition fait le sujet d’un poème de Dafydd ab Gwilym, connu sous le titre de Achau y Dylluan, ou la généalogie du hibou. Le poète lui demande son nom ; l’oiseau lui répond qu’on l’a appelée Blodeuwedd, et qu’elle était fille d’un seigneur de Mon. « Qui t’a métamorphosée ? » reprend le poète. « C’est Gwydyon, fils de Don, des abords de Conwy, qui, avec sa baguette magique, – il n’y en a plus eu de son espèce, – m’a fait passer de ma beauté dans le triste état où tu me vois, m’accusant d’avoir aimé, soleil éclatant d’une race brillante, Goronwy, le jeune homme vigoureux (Le texe gallois dit Goronowy fab Pefr Goronhir : Goronowy le fils vigoureux de Goronhir, ;il y a une syllabe de trop, il est vrai qu’on peut lire Gronwy ou Gronow), le seigneur de Penllynn, le beau, le grand. » (2ème éd., p. 158.)