Page:Loth - Mabinogion, tome 1.djvu/13

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et en quelque sorte classique, dans lequel ne rentraient que des récits traditionnels, depuis longtemps fixés, au moins dans leurs grandes lignes. On se trouve ainsi amené à préférer le sens proposé par John Rhys[1]: le Mabinog ou Mebinog serait un apprenti littérateur, un aspirant barde, et les Mabinogion comprendraient l’ensemble des connaissances formant le bagage littéraire du Mabinog[2], Malheureusement le mot avec ce sens ne se trouve dans aucun texte ancien. Quant à Mabinogi, il ne dérive nullement de maban, enfant, mais bien de mebin, dérivé de mab. Dans le Livre noir de Carmarthen, dans un poème de la première moitié du xiie siècle, un personnage puissant est célébré comme ryvel vebin, maître dans l’art de la guerre, professeur de guerre (F. A. B. 11, p. 6, vers 22) ;

Ruthur uthur auel, rynaut uvel, ryvel vebin.

« Toi qui a l’élan effrayeur de la tempête, l’agi-

  1. The text of the Red Book Mabinogion, p. VIII.
  2. Ce sens est donné avec précision dans les Jolo manuscripts, p. 211, collection fort curieuse mais disparate et dont les sources sont fort troubles. D’après ce curieux passage, le barde ayant ses grades officiels, devait prendre avec lui trois disciples (mabinogion, mebinogion). Ils avaient à passer trois degrés avant de devenir bardes à chaire. Les études du mabinog comprenaient : l’étude du gallois (orthographe, syntaxe, formation et dérivation) ; la connaissance de la métrique (allitération consonnantique elvocalique, rime, pieds, strophes, avec des compositions originales) ; l’étude des généalogies, lois, coutumes, histoire. Taliesin se vante de ses connaissances bardiques, qui se rapportent justement à certaines traditions conservées dans nos Mabinogion. Les poètes gallois, au xii-xiiie siècle, se vantent parfois de la pureté de leur langue.