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rent se coucher. Cette nuit-là Matholwch et Branwen couchèrent ensemble. Le lendemain, tous les gens de la cour se levèrent ; les officiers commencèrent à s’occuper du partage des chevaux, de concert avec les valets ; ils les distribuèrent de tous côtés jusqu’à la mer. Sur ces entrefaites, un jour l’ennemi de la paix dont nous avons parlé plus haut, Evnyssyen[1], tomba sur le logis des chevaux de Matholwch, et demanda à qui ils appartenaient. « Ce sont les chevaux de Matholwch, roi d’Iwerddon, » fut-il répondu. « Que font-ils ici ? » dit-il. « C’est ici qu’est le roi d’Iwerddon ; il a couché avec ta sœur Branwen ; ces chevaux sont les siens. » ― « Et c’est ainsi qu’ils en ont agi avec une jeune fille comme elle, avec ma sœur à moi ! la donner sans ma permission ! Ils ne pouvaient me faire plus grand affront. » Aussitôt il fond sous les chevaux, leur coupe les lèvres au ras des dents, les oreilles au ras de la tête, la queue au ras du dos ; s’il ne trouvait pas prise sur les sourcils, il les rasait jusqu’à l’os. Il défigura ainsi les chevaux, au point qu’il était impossible d’en rien faire. La nouvelle en vint à Matholwch ; on lui rapporta que les chevaux étaient défigurés et gâtés à tel point, qu’on n’en pouvait plus tirer aucun parti. « Oui, seigneur, » dit un des hommes, « on t’a insulté ; c’est bien ce qu’on veut te faire. » ― « En vérité, » répondit-il, « je

  1. Evnys, en gallois, signifie hostile, ennemi, fâcheux.