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PROLOGUE


I


Un rapsode était né : don d’augustes parents,
De longs voiles de pourpre et d’or enveloppée,
La lyre étincelait dans les rameaux errants
D'un laurier rose en fleurs, près d’une haute épée.
 
La Muse entre ses bras prit la lyre sculptée,
Poussa du pied le glaive et d’un geste enivrant
Touchant le nouveau-né, la face encor trempée
De larmes, lui sourit dans l’ombre en murmurant :
 
« Tu seras le poète aux grands yeux transparents,
« Qui s’étonne ébloui dans la nature fée,
« Des lauriers d’or au front et de la prourpre aux flancs.
 
« Pâle et les yeux fixés sur la voûte étoilée,
« Tu seras le songeur sublime, indifférent,
« Qui marche sous la lune et s’abreuve au torrent.