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21 juillet. — Ces environs de Poissy ensoleillés et comme ensommeillés sous la chaleur lourde, au bord de cette eau lente qui ne s’anime que le samedi soir sous le va et vient des yoles des canotiers du dimanche, et qui toute la semaine semble couler entre les hautes frondaisons dormantes de je ne sais quel pays enchanté, dire que j’ai pu traverser avant-hier sans une secousse au cœur leur énervante mélancolie, mélancolie des plaines fuyant à perte de vue le long des grandes routes bordées de peupliers, mélancolie des parcs délaissés de leurs hôtes et retournant à l’état de nature dans l’embroussaillement de feuillages et de fleurs folles des propriétés à l’abandon. Un entr’autres aurait dû cependant au passage me soulever tout droit de ma banquette et me jeter frémissant, les deux mains à la portière : ce vieux parc de Villennes avec ses immenses pelouses de blés verts et d’avoines, où les massifs d’arbustes rares semblent aujourd’hui d’autant d’îlots sombrés.

Villennes, la folie et le désastre d’une fortune de parvenu fondue entre les mains d’une bande noire d’architectes, Villennes et ses merveilleuses serres, fantaisie d’un financier obsédé de