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floraison des helléniums, d’une mélancolie d’adieu, malgré la pourpre vive des dahlias simples et des bégonias doubles, sous la morne jonchée des feuilles de platanes pleuvant sur les pelouses.

Oh ! la tristesse de ce jardin parisien d’octobre se délabrant lentement vis-à-vis l’agonie de cette femme au visage passionné et crispé, au regard dévorant, à la pâleur de morte ! Mais combien plus triste encore le silence hostile gardé par ces deux êtres de luxe et d’élégance en cette somptueuse chambre de poitrinaire, où la nuance adoucie des tentures, le contournement raffiné des meubles et jusqu’au parfum musqué du lilas blanc s’entassant là pour étouffer de tenaces relents d’éther et de phénol, semblaient vouloir faire une apothéose à la mort.

Une liaison pourtant célèbre dans le monde des lettres et du théâtre et dont le retentissement avait, pendant quinze années, amusé la badauderie de Paris, cet homme et cette femme aujourd’hui muets et refermés sur eux-mêmes dans ce quasi menaçant tête-à-tête ; elle, tragédienne acclamée, aujourd’hui brûlée aux flammes de toutes les passions et de toutes les