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— Et les mémoires du dix-huitième siècle, qu’en fais-tu ? Mlle Aïssé, la petite esclave circassienne achetée tout enfant par l’ambassadeur de France à Constantinople, le marquis de… (l’érudition me fait ici défaut), emmenée par lui à Paris, où il la fit élever et instruire pour en faire à dix-huit ans sa maîtresse.

— Parfaitement, j’ai compris ; seulement lui, c’est le contraire.

Nourri dans le sérail, j’en connais les détours.

Lui, on relevait à Paris pour le palais du Bardo, charmant, charmant. Mais mademoiselle Aïssé, si j’ai bon souvenir, n’appartint pas à son vieux bienfaiteur, il mourut avant le temps, le brave homme ; le ciel ne lui laissa pas celui de brouter cette jeune fleur et mademoiselle Aïssé, née et vouée courtisane, n’aima qu’une seule fois dans sa vie et d’un amour passionné, héroïque, son chevalier, le chevalier d’Aydie. Monsieur Aïssé a-t-il une chevalière, lui ?

— Une chevalière ! des chevalières, plus qu’il n’en veut et qu’il n’en peut avoir, mais des chevalières d’aide immorale et dissolue.

Nous arrivions à l’Arc-de-Triomphe, de Guery me quittait sur cet affreux jeu de mots.