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que je suis vieux, elles passent vers les collines ensoleillées comme des filles et des jouvenceaux, en chantant, et je ferme les yeux… et je souris en songeant que je fus un autre en l’autrefois.

« Oui, les préexistences, la vie antérieure de Baudelaire.

J’ai longtemps habité sous de vastes portiques.

« Les poètes ne sont peut-être, après tout, que des âmes qui se souviennent, des âmes douées de mémoire, lesquelles à travers les réalités présentes évoquent et surtout savent évoquer et les vieux maux soufferts et les splendeurs vécues au-delà, dans l’Autrefois.

« Ils sont dans le mouvement, ces jeunes, concluait-il en fermant la Revue, sincères ou habiles, ils ont flairé et senti le vent : il est certain que le naturalisme agonise ; on est las de photographies de basses mœurs et la nausée prend enfin le public d’une littérature d’évier et d’excréments…

« Le romantisme, qui eut des envolées sublimes s’est démodé par les oripeaux et le paillon, et pourtant il y a certainement autre chose…, peut-être l’étude du mystère, de l’insaisissable