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avec Oscar Grune, le peintre esthétique, venu ici pour obtenir de Claudius l’autorisation d’illustrer son poème du Roi d’Ys, une commande de Hachette à Grune, et nous avons bel et bien distingué tous deux cet Ophelius… Du reste, Aiguor a pris soin de nous le faire remarquer lui-même, il nous a conduits à bord du terre-neuvier sur lequel le garçon devait partir le lendemain, à bord du Saint-Maixent… Il l’a fait même descendre des vergues pour nous le présenter. « Hein ! est-il assez beau, cet animal, répétait-il, est-il beau, même trop beau pour un homme. » Pendant ses trois mois de séjour à terre, ce matelot était son compagnon de pêche, tantôt son modèle, ils montaient la même barque ensemble ; d’ailleurs, Claudius le tutoyait, mais vous, vous n’êtes jamais là et auriez-vous été là, vous avez des yeux pour ne pas voir.

— Et ce garçon est mort ?

— Il y a quinze jours, comme je vous l’ai dit. On l’a trouvé à marée basse, noyé dans les estacades des jetées. Ophelius ! son nom le prédestinait à cette fin tragique. Il avait une assez large plaie à la nuque, s’était-il blessé en tombant ? Quelqu’un l’avait-il frappé d’abord et