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créature, sous la main qui la peigne, défaille et s’abandonne avec des sourires d’extase et des fixes regards de morte torturée qui semble encore jouir.

« Chose étrange, ces séances, qui l’exténuent et la brisent, sont le seul soulagement que je sache à ce mal bizarre et déroutant après cinq ou six coups de peigne donnés de certaine manière et prolongés savamment, il lui arrive de s’endormir, mais d’un sommeil profond et à traits crispés, à yeux grands ouverts et fixes comme sous des passes magnétiques ; les somnambules ont de ces accès de sommeil effrayant. Tant que lord Mordaunt garde sa main dans la sienne ou lui frôle du bout des doigts les cheveux et la nuque, elle dort ; mais Mordaunt cesse-t-il son point de contact, et tout autre que lui, moi, par exemple, essaye-t-il de prolonger son sommeil en continuant les effleurements, aussitôt elle s’éveille avec la violence d’une secousse électrique », et, en proie à son mal, sa dolente voix reprend : « Peignez-moi, peignez-moi », avec la ténacité d’une obsession. »