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— Réponds-moué, Ménard ! mâcha-t-il, pourquoi ta loi fait-elle prendre un homme pour une bataille de coq ?

Tout le monde avait tendu l’oreille, anxieux de savoir quel sort serait fait au garde-pêche.

Mais celui-ci, quoique très mal à son aise devant tant d’interrogation, dans tous les yeux, répondit quand même, intrépide :

— Rapport que c’est cruel de faire hacher en morceaux des animaux de même, qui t’ont rien fait en toute !

— Pis l’homme qui tue son coq, lui, pour le manger, est-ce que tu l’arrêtes ? poursuivit Médas, grave et problématique.

— Non expliqua le garde-pêche, quand on tue un coq pour le manger, on le tue proprement, pis ça le fait moins souffrir.

Brébœuf cracha sa chique de côté, le mot de la fin allant lui appartenir.

— Ah tu crés ça, toué ? Eh ben, v’là ousque ta loi est mal faite ! Quand un homme tue son coq pour le manger, il le fait ben plus souffrir qu’un autre, pis la preuve, blasphème, c’est que le coq en meurt !

Et ayant dit, Médas Brébœuf tourna les talons et fit claquer la porte du bureau de poste, son argument était décisif.