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LE JETEUX DE SORTS



Maintenant qu’ils avaient rejoint la route, après d’infructueuses recherches dans le bois pour trouver un nid de grives, Tit’Fred et Déric, déjà très en retard, entreprirent de regagner le village d’une seule traite.

Ils allaient bon train depuis quelques instants, leurs petits souliers de bœufs faisant craquer les mottes de terre sèche, lorsqu’ils tombèrent tout à coup en arrêt, l’œil fixe.

— Wohaha !… firent-ils.

C’était au pied de la grande montée, là où ce qu’il y a une grosse pierre, l’autre bord du fosset.

Grande fut leur surprise d’apercevoir une espèce de colporteur qui tournait autour de la grosse pierre en la scrutant attentivement sur toutes ses faces. Il portait une petite valise passée en bandoulière, et ses bésicles fumées faisaient comme deux trous noirs à la place de ses yeux.

— Ça serait-i qu’i’veut la voler ? souffla Déric, interdit.

— Ben, i’peut se fouiller, répondit Tit’Fred, grosse comme qu’elle est pis ’tit comme qu’il est, i’l’emportera ben jamais. Certain !…

Intrigués, ils étaient là, rivés à la route. Mais quand ils virent l’étranger sortir un pinceau de sa valise et peindre de grands caractères sur une des faces de la roche, devenu tout pâle, Déric râla :