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l’instruction qu’ils y trouvent, ils débarrassent, par leur absence, d’une foule de petits soins la mère, qui peut alors louer aussi sa journée, et travailler utilement de son côté ; mais nous, que notre propriété réclame à toute heure du jour, nous dont les enfants sont à chaque instant appelés loin de l’école par les divers besoins de la culture, il nous faudra payer des bras de plus pour remplacer ceux-là, ou condamner notre petite famille à une infériorité d’instruction trop évidente, puisqu’ils ne pourront suivre l’école avec la même assiduité (79). »


3o Abandon des écoles pour les travaux d’agriculture.


Cette plainte des cultivateurs nous mène à la véritable plaie de l’instruction primaire dans les campagnes. On peut prévoir, espérer un temps où, mieux éclairée sur ses véritables intérêts, la population indigente ne négligera plus, comme aujourd’hui, le bienfait qui lui est offert ; où les préjugés d’amour-propre dans les classes supérieures, leurs craintes mal fondées, feront place à des sentiments d’équité plus conformes à l’esprit de la loi ; mais qui peut prédire le jour où les écoles ne seront plus désertées pour les champs pendant la saison des travaux (80) ? Et cependant, quel fruit peut-on attendre d’une instruction ainsi donnée à bâton rompu (81) ?

On se plaint généralement du peu de progrès que font les enfants dans les écoles de village, et certes, on a bien le droit de s’en plaindre. On en accuse l’ignorance et la négligence des instituteurs, et malheureusement elle est sans excuse ; mais, en vérité, quels progrès d’ailleurs pourraient faire les élèves pendant leur court séjour à l’école ? Sur presque tous les points de la France, l’école n’est pas fréquentée plus de trois mois (82) : c’est le terme moyen qu’il convient de prendre entre les pays où les enfants s’y rendent quatre ou cinq mois, et ceux où deux mois sont réputés suffire pour leur instruction