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Citron.

En effet elles furent primitivement formées de la côte que nous leur avons donnée, et ce ne fut pas la plus petite : et il est tout simple que celui qui a donné la côte donne de quoi l’entretenir[1]. L’exemple d’Adam justifie mille maris.

Don Juan.

Comment cela ?

Citron.

Ève ne lui donna-t-elle point pour nos péchés le triste morceau que vous savez ?

Don Juan.

Où veux-tu en venir ?

Citron.

Et à elle-même, qui le lui avait donné ?

Don Juan.

Le serpent.

Citron.

Ou le diable, qui prit cette forme-là pour la mieux tromper. — Aussi, lorsqu’une femme donne à son mari de quoi manger, il n’a qu’une seule excuse, l’exemple d’Adam ; et tout en reconnaissant sa faute, il doit se dire : « Mangeons, alors même que cela viendrait du diable. »

Don Juan.

Moi, je ne suis pas ici un mari ; et même je ne connais pas la femme en question.

Citron.

Vous ne lui en serez pas moins reconnaissant.

Don Juan.

Comme doit l’être un galant homme.


Entre L’ALCAYDE.
L’Alcayde, à don Juan.

Deux femmes voilées attendent après vous.

Don Juan.

Au nom du ciel, laissez-les entrer.

Citron.

Ont-elles l’air comme il faut ?

L’Alcayde.

Tout à fait.

Citron.

En ce cas, j’aime à croire qu’elles se seront munies de pastilles odorantes[2].

  1. Il y a ici une grâce intraduisible sur costa (dépense, entretien) et costilla (côte), qui paraît le diminutif du premier mot. « Il était tout simple que celui qui avait donné la costilla (la côte) s’obligeât à la costa (à la dépense ou à l’entretien). »
  2. Il y a ici dans le texte des allusions à certains détails très-délicats de la toilette