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Inès.

Si nous nous lions ensemble, tu seras, toi, un citron d’amour, aigri par la jalousie.

Citron.

Un citron d’Andujar[1].

Inès.

Le vilain drôle !

Elle sort.
Don Juan, regardant le portrait.

Qu’elle est jolie !

Citron.

Elle est divine.

Don Juan.

Il n’y a pas ici des sourcils verts ou bleus, ni des cheveux d’emprunt. — La belle bouche !

Citron.

C’est pur sang[2]. Mais, comme vous savez, je soupçonne quelque piége.

Don Juan.

Non, non ! Je me meurs.

Citron.

Sans l’avoir vue ?

Don Juan.

Certainement.

Citron.

Les sages disent qu’on ne peut pas avoir d’amour pour une personne qu’on ne connaît pas.

Don Juan.

Les sages sont des fous. — Écoute.

Citron.

Après ?

Don Juan.

As-tu vu une montagne d’or ?

Citron.

Non, monseigneur.

Don Juan.

Eh bien, moi je te prouverai que tu pourrais l’aimer.

Citron.

Comment cela ?

Don Juan.

En pensant à une de ces montagnes que tu as traversées et ensuite à l’or que tu as vu, et en formant dans ton esprit l’idée d’une montagne d’or. — De même moi, je réunis les deux idées de femme et de beauté, et j’adore cet ange.

  1. Dans le texte, Citron répond simplement Andujar. Andujar est, comme on sait, une petite ville de l’Andalousie ; mais je soupçonne qu’il y a ici quelque plaisanterie d’un goût équivoque.
  2. Es sangre pura.