Tu lis, à ce qu’il paraît, les romances.
Silence, madame, car voici que la belle Xarife dit à sa sœur de regarder le vaillant Maure qui passe dans notre rue, monté sur un cheval alezan.
Prends garde, Inès ; tu fais du Romancero ta lecture habituelle, et il pourrait t’arriver comme à ce pauvre chevalier.
Don Quichotte de la Manche, Dieu pardonne à Cervantes ! fut un de ces extravagants que vante la Chronique[1]. Pour moi je lis dans les Romanceros, et je m’en trouve bien… mon esprit s’y forme tous les jours ; et quant à ce qui est de l’amour, je me suis mise à songer qui je pourrais aimer.
Veux-tu que je te le dise ?
Bien volontiers, madame.
Aime un médecin, afin qu’il te guérisse de ta folie.
C’est que, madame, les médecins ne guérissent pas le mal d’amour.
Et qui donc alors le guérit ?
Le temps, le temps seul. — Et d’ailleurs, madame, je n’en suis pas là, je n’aime pas encore.
Alors pourquoi veux-tu que j’aime ?
C’est que vous y êtes obligée.
Moi ? et comment ?
L’occasion est superbe. Vous le savez, un noble cavalier, le fils du corrégidor, — en un mot, don Louis de Ribera vous adore.
Il est vrai, il m’a parlé de ses sentiments, mais il n’a pas été jusqu’à mon âme. — D’ailleurs il se consolera aisément.
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Don Quixote de la Mancha,
Perdone Dios a Cervantes,
Fue de los estravagantes
Que la Coronica ensancha.