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Frondoso.

À Dieu ne plaise, ma chère Laurencia, que je t’abandonne ainsi !

Laurencia.

Ne vois-tu pas avec quelle sévérité l’on traite les autres, et la fureur qui anime ce juge ? Conserve-toi. Fuis sans retard.

Frondoso.

Comment peux-tu me donner un semblable conseil ? Comment pourrais-je laisser mes concitoyens dans le péril, et m’éloigner de toi ? — Cesse de l’exiger. Dans les circonstances où nous nous trouvons, il serait déshonorant pour moi de ne point courir les mêmes dangers que les autres. (On entend des cris derrière la scène.) J’entends des cris, ce me semble — Si je ne me trompe, c’est quelqu’un que l’on met à la torture. Écoutons.

Le Juge, derrière la scène ainsi que les témoins.

Allons, bon vieillard, dites la vérité.

Frondoso.

C’est un vieillard qu’on met à la question.

Laurencia.

Quelle cruauté !

Estévan.

Laissez-moi respirer.

Laurencia.

Dieu ! c’est mon père !

Le Juge.

Je vous laisse. — Répondez, qui a tué Fernand Gomez ?

Estévan.

C’est Fontovéjune.

Laurencia.

Ô mon père ! gloire à toi !

Frondoso.

Quel admirable courage !

Le Juge, au bourreau.

Prends cet enfant. Allons, drôle, serre-le bien. (À l’enfant.) Je ne l’ignore pas, tu sais tout. Fais connaître les coupables… Il s’obstine à se taire. (Au bourreau.) Serre donc, ivrogne.

L’Enfant.

Seigneur, c’est Fontovéjune.

Le Juge.

Par la vie du roi ! misérables, je vous étranglerais de mes mains. Qui a tué le commandeur ?

L’Enfant.

Fontovéjune.

Frondoso.

Se peut-il qu’on donne la question à un enfant et qu’il nie avec cette constance !