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Terrazas.

Débarrassons de lui le navire.

Arana.

À la mer ! à la mer !

Barthélemy.

Un moment ! arrêtez !

Arana.

Laisse-nous, Barthélemy.

Barthélemy.

Je ne souffrirai point que l’on tue mon frère.

Arana.

Il n’y a pas de milieu. Qu’il nous fasse voir la terre, ou nous lui ferons voir la mer de près.

Pinzon.

Et où voulez-vous qu’il trouve la terre ? Son esprit bizarre, et semblable à un moulin à vent, a rêvé un monde impossible, et c’est ce monde qu’il veut découvrir. Qu’attendons-nous davantage ? À la mer !

Colomb.

Arrêtez ! écoutez, je vous prie, un seul mot.

Arana.

Dites-en dix, dites-en vingt. Mais vous en diriez mille, que vous ne réussiriez plus à nous tromper.

Colomb.

Si d’ici à trois jours je ne vous ai pas montré la terre, je me livre à vous, tuez-moi.

Terrazas.

Quoi ! vous persistez ?

Barthélemy.

Le délai n’est pas si long. Vous pouvez bien attendre jusque-là.

Frère Buyl.

Au nom du ciel, Espagnols, accordez-moi trois jours encore, et l’on vous montrera les nuages colorés d’un autre horizon.

Arana.

Et sans doute un autre soleil ?

Frère Buyl.

Allons, faites cela pour moi.

Arana.

Eh bien, qu’il en soit ainsi : encore trois jours !

Terrazas.

Voici un bon levant.

Colomb.

Qu’on hisse les vergues, et qu’on fasse jouer la pompe ! (À part.) Seigneur, Seigneur, souvenez-vous de moi !

Le navire disparaît au milieu des cris.