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Sanche.

Ô mon bien ! la laisseras-tu ouverte ?

Elvire.

Oh ! non, impossible.

Sanche.

Enfin, par cette promesse, tu me sauves la vie. Je me serais tué.

Elvire.

Et moi je serais morte avec toi.

Sanche.

Le curé est venu, mais n’a pas pu entrer.

Elvire.

Don Tello s’y est opposé.

Sanche.

Mais si tu consens à m’ouvrir, je me consolerai de ce malheur ; car pour guérir des tourments comme les miens, l’amour vaut un curé[1].

Ils sortent.



Scène IV.

La campagne devant la maison de Nuño. Il est nuit.


Entrent DON TELLO et des Domestiques.
Tello.

Vous m’avez compris ?

Celio.

Oui, monseigneur, et il ne faut pas être si malin pour cela.

Tello.

Entrez. À cette heure la charmante Elvire et le vieux doivent être seuls.

Celio.

Tout le monde s’est retiré, non sans pester un peu de voir la noce remise.

Tello.

Ma foi ! Celio, j’ai suivi l’inspiration de l’amour. J’étais jaloux, je souffrais de voir que ce vilain rustre possédât la beauté que je désire. Lorsque je serai fatigué d’elle, le nigaud pourra l’épouser ; je lui donnerai du bétail, des biens, de l’argent, et avec cela il vivra aussi heureux que tant d’autres qui sont dans le même cas. Après tout, je suis riche et puissant ; et puisque cet homme n’est point encore marié, je veux user de mon pouvoir. — Allons, mettez vos masques.

  1. Que no es mal cura el amor
    Para sanar voluntades.

    Le mot cura (curé) signifie aussi en espagnol l’heureux résultat d’un traitement médical, une cure ; et sans aucun doute, Lope a joué ici sur la double signification de ce mot.