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LE CHIEN DU JARDINIER.

Tristan.

Je me contenterai de deux cents écus, fût-ce le diable.

Ricardo.

Eh bien, nous vous en donnerons trois cents, et que cela soit fait cette nuit.

Tristan.

C’est bien. Maintenant, tout ce que je vous demande, c’est d’abord le nom du personnage, et ensuite un à-compte.

Ricardo.

Vous connaissez Diane, la comtesse de Belflor ?

Tristan.

Oui ; j’ai même quelques liaisons dans sa maison.

Ricardo.

Pourriez-vous bien tuer un de ses domestiques ?

Tristan.

Domestiques, valets, suivantes, je tuerai tout ce que vous voudrez… jusqu’aux chevaux de son carrosse.

Ricardo.

Eh bien, l’homme dont il faut nous défaire, c’est Théodore.

Tristan.

Alors il faudrait s’y prendre autrement : car, d’après ce qu’on m’a dit, Théodore ne sort plus de nuit, et dans la crainte sans doute de votre ressentiment, il m’a fait prier ces jours-ci d’entrer à son service. Laissez-moi entrer chez lui, et je vous promets de lui donner un de ces jours deux petites saignées qui lui feront avoir un bon Requiem, sans qu’il y ait personne de compromis. — Eh bien, ça vous va-t-il ?

Frédéric.

Il nous aurait été impossible de trouver dans tout Naples quelqu’un qui fît mieux et plus sûrement notre affaire. Entrez donc à son service, et quand vous lui aurez donné, sans qu’on s’en doute, ce qu’il mérite, venez vous réfugier chez nous.

Tristan.

Maintenant, messeigneurs, j’aurais besoin de cent écus.

Ricardo.

En voilà cinquante ; pour le moment je n’ai que cela dans ma bourse. Dès que vous serez établi chez la comtesse, je vous garantis le reste, et mieux encore.

Tristan.

Tenez seulement votre promesse. Vos seigneuries peuvent s’en aller tranquilles ; car Bras-de-fer, Brise-murailles, Arfuz le-lion et Peur-au-diable m’attendent ici à côté, et je ne voudrais pas qu’ils pussent concevoir le moindre soupçon.

Ricardo.

Vous avez raison, mon cher. Adieu.