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Le Comte.

Il est impossible de te résister.

Le Comte et Laura s’embrassent.
Laura.

Ah ! Martin, que tu es gentil !

Le Comte, à part.

Celia ! pardonne-moi !

Laura.

Il paraît que tu es encore fâché ? Tu ne me regardes pas.

Le Comte.

C’est que je suis si malpropre que j’en suis tout honteux. Un autre jour, j’espère, tu me verras habillé plus proprement et partant de meilleure humeur.

Laura.

Hélas ! ma destinée voulant que j’aime qui me déteste, je ne doute pas qu’il ne m’arrive encore un nouveau et plus grand malheur. Marie-toi, ingrat, marie-toi ; j’en aurai du chagrin sans doute, mais j’ai déjà appris à pleurer cette espèce de disgrâce. Je ne croyais pas cependant que tu m’abandonnerais si tôt.

Le Comte, à part.

Il faut pourtant qu’elle me laisse aller voir Celia ; mais pour cela il me faut lui témoigner plus d’amitié (Haut.) Allons, ma Laura, ne te chagrine pas, ne pleure pas, et que tes yeux reprennent leur éclat et leur sérénité. Songe que je suis sur mon départ, et que je ne veux pas te quitter fâchée contre moi.

Laura.

Je suis contente, ô Martin ! s’il te plaît que je le sois. Mais, je t’en conjure, ne me parle plus d’un homme que j’abhorre, dont je maudis le nom, dont la vue m’est odieuse et dont je souhaite la mort. Pourquoi en serais-tu jaloux ? De même que l’eau qui a passé ne revient plus au moulin, de même un amour oublié ne retourne jamais dans un cœur. Je suis à toi à l’avenir, et l’amour que j’ai eu pour un autre n’aura servi qu’à m’apprendre à mieux t’aimer.

Le Comte.

Je te crois en tout, Laura, et je te quitte. Si je suis si pressé, c’est afin de te revoir plus promptement. Dis-moi, que veux-tu que je t’apporte de la ville ?

Laura.

Tu y vas donc ?

Le Comte.

Ton père m’a commandé de transporter cette farine chez la duchesse.

Laura.

Mon père ne cesse pas de t’envoyer en commission.

Le Comte.

Ton père a raison, s’il pense que tu dois être à la fin le prix de mes services.