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eux, les bras ouverts, avec des cris d’étonnement. Et alors, ils reconnurent Basile le forgeron, qui leur fit l’accueil le plus affectueux et les conduisit dans son jardin. Assis sous une tonnelle de rosiers, après des questions et des réponses sans fin, ils épanchèrent librement leurs cœurs, et renouvelèrent leurs tendres embrassements, les pleurs et les rires se succédant tour à tour, et faisant place ensuite à de longues réflexions silencieuses. Ce qui, surtout, les rendait pensifs, ce qui remplissait le cœur d’Évangéline de doutes amers et de noires inquiétudes, c’est que Gabriel ne paraissait pas. Enfin, Basile, gêné lui-même, et voyant que ses amis se taisaient, parla en ces termes :

« Si vous êtes venus par l’Atchafalaya, je ne comprends pas que vous n’ayez point croisé la barque de mon fils Gabriel, sur quelque point du Bayon. »

Ces simples mots de Basile firent passer une ombre sur la figure d’Évangéline, dont le cœur se serra ; ses yeux se mouillèrent de pleurs, et c’est d’une voix tremblante qu’elle dit : « Hé ! quoi ? pas ici ? Gabriel est parti ? »

Alors, cachant son visage dans les bras de Basile, elle soulagea son cœur par des plaintes et des larmes.