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évangéline

Soudain, les coqs, croyant le jour venu, se mirent à chanter bruyamment dans l’intérieur des métairies, les bestiaux et les chevaux, surpris par l’incendie, brisèrent leurs liens, franchirent les barrières et les clôtures, et, affolés par la peur, s’enfuirent dans la prairie. Ces bruits que le vent du soir apportait aux infortunés proscrits augmentaient encore leur douleur.

Le prêtre et la jeune fille, terrifiés par ce spectacle, mais incapables de prononcer une parole, avaient les yeux fixés sur cette lugubre clarté, toujours grandissante et d’un rouge de plus en plus éclatant. Quand ils se retournèrent pour adresser la parole à leur compagnon silencieux, ils le virent tombé en bas de son siège, étendu et immobile sur le sable. Il était mort. Le prêtre souleva lentement la main inanimée du vieillard, et Évangéline, saisie d’effroi, s’agenouilla auprès de son père, en poussant de profonds gémissements. Bientôt elle perdit connaissance, et laissa tomber sa tête sur la poitrine de cet être chéri que la mort venait de lui ravir. Elle resta ainsi toute la nuit, anéantie par un sommeil lourd et profond. Quand elle sortit de cet état d’insensibilité, elle vit une foule de gens rassemblés autour d’elle ; l’affection était empreinte sur tous les