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un moment silencieux ; mais bientôt s’éleva, toujours croissante, une lamentation de deuil et de colère, puis, poussés par une même impulsion, tous se précipitèrent vers la porte de l’église pour fuir leurs oppresseurs. Vaine tentative, il leur était impossible de s’échapper. Alors des cris et de farouches imprécations retentirent dans la maison de prières.

Tout à coup, au-dessus de toutes les têtes, se dressa Basile le forgeron, les bras levés en l’air, la face enflammée et contractée par la colère, il s’écria d’une voix tonnante :

« À bas les tyrans d’Angleterre ! Ils n’ont jamais reçu notre serment de fidélité ! À mort ces soldats de l’étranger, qui s’emparent de nos foyers et de nos moissons ! »

Il en eût dit davantage ; mais l’impitoyable main d’un soldat lui ferma la bouche d’un coup brutal, et l’étendit sur les dalles de l’église.

Soudain, au fort de la lutte et du tumulte de cette bataille exaspérée, la porte du sanctuaire s’ouvrit et livra passage au Père Félicien qui, la figure grave, monta lentement les degrés de l’autel. D’un geste de sa main vénérable, il imposa silence aux clameurs de cette foule agitée que sa présence frappait